vendredi 2 septembre 2011

Foot : le prix du rêve





Tout démarre avec cette petite phrase du président du FC Séville :
« Mais Mon Dieu ! Y’a t-il un seul supporter qui ne dit pas que la Liga est prostituée, dénaturée et corrompue ? (…) Notre championnat n’est pas la plus grande cochonnerie d’Europe, mais du monde ! C’est un championnat du tiers-monde où deux clubs volent l’argent des autres via la télévision. (…) Nous sommes en train de discréditer la Liga ».

En prononçant cette phrase, Del Nido, déjà connu pour ses sorties toujours aussi mesurées les unes que les autres, jette un pavé dans la mare ou plutôt un chorizo dans la paëlla (faisons local). En une seule phrase, le président sévillan a fait prendre conscience à tout un peuple que la Liga est l’affaire de deux géants qui ne laissent aucune chance aux autres clubs. Ce championnat vendu par les médias espagnols comme « Liga des las Estrellas » est en réalité une mascarade sportive où le titre ne peut que naviguer entre Madrid et Barcelone. Pour mémoire, le dernier championnat qui a échappé aux deux ennemis jurés a pris la direction de Valence en 2004. Depuis, c’est une véritable course à l’armement qui agite les madrilènes et les catalans. A coup de millions, les deux clubs se répondent sur le marché des transferts laissant toujours moins de possibilités à leurs concurrents pour les rattraper.

Vous me direz que cette réaction est celle d’un président jaloux du succès de ses deux rivaux ? 
Ce n’est pas faux mais pas entièrement exact non plus… Lorsque Del Nido parle de vol, de prostitution et de corruption, il parle du système de répartition des droits en Espagne. En effet, pour faire simple, chez nos voisins, les médias négocient directement les droits avec les clubs. Ce système se révèle pervers car étant donné leur attractivité, le Real et le Barça se partagent le pactole. Selon les derniers chiffres, la saison passée ils ont à eux seuls capté entre 40 et 50% du paquet global. Dans un championnat où de plus en plus de clubs se retrouvent contraints de déposer le bilan (et je ne parle pas de la situation en Liga Adelante), cette situation fait grincer des dents.  En effet, cette répartition inégale ne fait qu’accentuer les différences permettant aux deux gros de recruter et laissant les 18 autres dans un marasme économique inquiétant.

Et maintenant ? On fait quoi ?

Jusqu’à présent, personne ne faisait trop attention à cette situation. Le Barca et le Real se disputaient le trophée, laissant les miettes aux autres qui disputaient un second championnat assez serré. Grâce aux recrutements « galactiques » la Liga passait pour le premier ou le deuxième championnat du monde et tout le monde était content que la C1 rejoigne la péninsule et n’aille pas garnir les vitrines du royaume britannique. Sauf que la crise est passée par là, et avec elle son lot de faillites, salaires impayés et autres naufrages sportifs… Mallorca a quand même été exclu de l’Europa League à cause de sa dette gigantesque.
Cette saison, c’est différent. Après une première journée annulée à cause de la grève solidaire des joueurs, les présidents de club rejettent la faute sur les deux géants. La réaction de Sergio Ramos, réputé pour sa bêtise sagesse ne s’est pas faite attendre. Sur le modèle de quelques politiques français il a clairement exprimé son opinion : La Liga Barca/Real, tu l’aimes ou tu la quittes. Dans le texte ça fait :    « Del Nido peut partir s’il n’aime pas la Liga et chercher un autre championnat. »
Ce qui risque plutôt d’arriver si l’on en croit l’intervention de Valdano aujourd’hui, c’est que le Real et le Barca soient les premiers à pousser pour la création d’une ligue Européenne fermée à la manière de la NBA. Une ligue où l’on dépenserait sans compter, une ligue qui gérerait elle-même ses droits TV, une ligue qui dirait F**K au fair-play financier voulu par Platini.
Ce serpent de mer refait surface et semble plus que jamais d’actualité à l’heure où la crise économique frappe de plein fouet les clubs européens.
Alors, oui, on peut comprendre la lassitude de certains présidents face à cette situation mais maintenant, mettons nous à la place du public.

Le rêve a un coût


Mis à part quelques acariâtres qui ont décidé de créer le hashtag #ligademierda sur Twitter (allez y jeter un coup d'oeil)  pour faire part de leur mécontentement, qui peut dire à l’heure actuelle qu’il n’aime pas voir jouer le Real ou le Barca ?
Alors on peut raisonner différemment de l’ami Del Nido, le foot est certes un sport et le sport est régi par des lois d’équité et de justice… Mais le foot est maintenant avant tout un spectacle. 
Quels grands metteurs en scène, quels grands producteurs ne s'endettent pas ?  
J’ai envie de voir des Manchester/Barcelone, des Real/Chelsea et ce à n'importe quel prix. Je le dis et je le revendique ! Peu m'importe que les clubs soient endettés jusqu'au cou si le spectacle est au rendez-vous. Alors oui, la Coupe de France fait sourire lorsqu’un club de National arrive en finale, mais le Clasico est retransmis dans 140 pays, ce n’est pas le cas d’un Rodez/Sedan. Le fair-play financier de Platini se défend, il est juste et sûrement nécessaire si l’on adopte le point de vue des clubs lambda mais ce qui fait rêver la planète c’est les enchaînements de Messi, les dribbles de Ronaldo. Et ces gestes, ces joueurs, il faut les payer au prix fort. Certains peuvent le faire en s'endettant, d'autres non. 


Si demain on empêche à ces grands clubs de se renforcer quelque soit le prix, les compétitions seront plus serrées, elles seront plus disputées, plus équitables tout simplement, mais seront-elles plus intéressantes ? 
Si pour vous, attendre la dernière journée pour savoir qui sera champion est plus intéressant que vibrer pendant 90 min au rythme des plus grands joueurs du monde alors RDV en 2017 pour une finale de Ligue des Champions entre le BATE Borisov et Udinese. 


Pour ma part, je regarderai la Super Ligue composée des plus grands endettés du monde. Vous savez, ceux qui font rêver les enfants. 

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